Le 14 janvier, le capitaine de vaisseau Laurent Hava, commandant la B.A.N. de Lann-Bihoué a officialisé la mise en service des nouvelles installations ultramodernes de la tour de contrôle aérien et de la salle d’approche. Bien que l’aérodrome soit à la fois civil et militaire (aviation civile et aéroclubs) avec 29000 mouvements annuels répartis en trois tiers quasi équitables, ce chantier de près de 8M€ a été intégralement financé par la Défense (au titre de la collaboration avec l’aviation civile et hors contrat de protocole) et porte essentiellement sur le matériel.
Ce changement radical des équipements témoigne d’une volonté clairement affichée du Ministère de la Défense de valoriser le savoir-faire et le niveau de formation des ses personnels en s’imposant des exigences civiles de formation et de contrôle. Cela apporte plus de formalisme, un regard extérieur, c’est une question de traçabilité. Cette logique de référentiel du civil vers le militaire fonctionne à Lann Bihoué avec un échange propre à la base (comme Hyères et Nîmes) dont les pistes sont ouvertes à l’aviation civile : les contrôleurs militaires contrôlent aussi les avions civils. Depuis longtemps la Marine a fait le choix de former les personnels à l’ENAC (Ecole Nationale de l’Aviation Civile). Les nouveaux équipements du C.L.A. Contrôle Local de l’Aérodrome, répondent aux normes européennes de l’aviation civile, tout comme les processus techniques et les méthodes de formation. Le commandant HAVA précise que « c’est la première fois que la Défense rédige un dossier de sécurité, conformément aux exigences de l’aviation civile » (taux de pannes, niveaux de sécurité par modules, check-lists et mesures correctives…): On applique aux pilotes toutes les règles de l’aviation civile (la première école normes JAR/FCL a été créée à Lann Bihoué), les normes ESAR 5 aux contrôleurs et d’ici fin 2011, les normes de navigabilité pour les techniciens.
Le métier du contrôleur aérien comporte trois missions spécifiques : circulation au sol, contrôle à vue (métier Tour) dans la zone d’approche avec le trafic civil VFR (à vue) plus la radio et enfin, le métier d’approche avec les radars, pour les vols IFR ou par condition de visibilité réduite. Les responsabilités sont différentes mais totale dans le cas d’un contrôle par radar. « Les contrôleurs sont appelés régulièrement en renfort sur le porte-avion et on a aussi besoin de cette compétence contrôle à bord des bâtiments de projection et de commandement et à bord des porte-avions, ici on a tout un tissu sur lequel on vient puiser pour faire marcher nos bateaux » explique le commandant. La B.A.N. de Lann Bihoué compte une quarantaine de contrôleurs, dont la moitié sont des femmes. Ils disposent désormais d’un matériel de dernière génération, « plus performant et assurant un niveau de sécurité optimal à l’image de ce qui existe sur les plus grands aéroports internationaux ».
Les améliorations du nouveau système portent notamment sur l’ergonomie et les fonctionnalités des matériels (interfaces homme/machine) radios, radars et téléphoniques, utilisés par les contrôleurs pour la gestion du trafic aérien civil et militaire sur zone (jusqu’à 2500 pieds) et dans la région terminale de contrôle (plus de 2500 pieds). Une assistance bienvenue, surtout par mauvais temps, avec des conditions de quart parfois stressantes. L’équipe du lieutenant de vaisseau Karine Allard, chef contrôle, travaille plus sereinement.
CS-SI Communication Systemqui développe le CLA 2000 (Contrôle Local d’Aérodromes) pour l’armée de l’air a fourni le nouveau système de la tour. La visualisation radar est désormais centralisée : Un menu déroulant sur écran tactile permet de visionner aussi les informations du COTRA (radar civil) qui viennent, en mode synthèse, enrichir celles des deux radars CENTAURE (radar panoramique à longue portée) et PAR (Precision Approach Radar) de la l’aéronavale en une vision panoramique du trafic des aéronefs. Les avions sont facilement identifiables sur les écrans radars et cela permet de vérifier une position à 160 milles nautiques.
Les communications sont maintenant centralisées (Radiocommunications, Téléphonie et Interphonie), tout en gardant des moyens de secours en cas de panne. De plus, le travail du contrôleur est sécurisé par un filet de sauvegarde : des alarmes sonores se déclenchent en cas de rapprochement dangereux entre deux avions ou trop près du sol. La tour n’a pas encore adopté le stripping automatique en développement dans l’aviation civile et l’armée de l’air, et continue à noter manuellement les informations de plan de vol sur les bandes cartonnées (strip). La salle d’approche s’est également dotée de plusieurs Final (terminal) PAR permettant au contrôleur de guider lui-même l’avion quand il n’y a pas d’ILS (Instrument Landing System) ou Système d'atterrissage aux instruments, moyen de radionavigation le plus précis utilisé pour l'atterrissage IFR.
A la vigie, le poste SOL suit tous les roulages des aéronefs et des véhicules jusqu’à la piste et le poste AIR est chargé d’aligner les avions sur la piste et d’orchestrer décollages et atterrissages. Ils bénéficient aujourd’hui d’un déport du contrôle de la salle d’approche et disposent des mêmes équipements y compris une Final PAR
Désormais, la formation et le maintien des compétences des contrôleurs se fait à l’aide d’un simulateur conformément aux exigences des normes européennes de l’aviation civile. Le Simulateur d’Entraînement au Contrôle Aérien de la Marine, SECAM intègre le pool de simulateurs du G.E.I/ (Groupement Entrainement Instruction) dirigé par le capitaine de frégate Fabrice RISANI, commandant adjoint entrainement-instruction. Le GEI regroupe dans 4 bâtiments l’ensemble des outils de formation de la BAN dont deux simulateurs de pilotage E2C (pour Hawkeye et Atlantique) et deux simulateurs tactiques reproduisant les appareils.
Le SECAM est le même système SCANSIM de la société EGIS avia, utilisé par l’ENAC (Ecole Nationale de l’Aviation Civile). Après Hyères et Lorient, les bases de Landivisiau et Lanvéoc en seront prochainement équipées. Il est composé de deux postes instructeurs et deux postes élèves et d’une vue panoramique réplique conforme de la base. Dès la fin du mois de février, les premières sessions permettront aux contrôleurs de s’entraîner et de se former aux situations inhabituelles et à la gestion des situations de crises, grâce à une réalité virtuelle en 3D, et plus seulement par des exercices théoriques. Le simulateur, intégré au GEI, garanti une totale neutralité des formateurs qui ne sont plus juges et partie et rentre dans le processus de maintien des qualifications. Une dizaine de scenarios par type d’exercice (sol, air et final) sont en cours de réalisation. Ce nouvel outil fera désormais partie du quotidien des contrôleurs.