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Retour sur la planète Mars !

Interview de Hervé Martel, Président du directoire du port de Marseille Fos.

Euromaritime est de retour dans la cité phocéenne. Cette ville portuaire fondée par les Grecs environ 600 ans avant J.C. a, dès l’Antiquité, inscrit son histoire dans une tradition maritime. Avec son Vieux Port et son Grand Port Maritime construit sur le golfe de Fos au XIXè siècle, Marseille est depuis toujours au carrefour des routes maritimes mondiales et la porte d’entrée naturelle du Sud de l’Europe. Terre d’accueil et d’immigration, au carrefour des civilisations méditerranéennes, elle est un trait d’union entre les deux rives de Mare Nostrum, remarquablement incarné par le Mucem. Le rendez-vous de la croissance bleue est l’occasion de prendre le pouls de l’industrie et d’échanger avec certains de ceux qui font de la planète Mars, la ville maritime par excellence.

Mis à jour : juin 2022

Sea to sea : L’industrie maritime et portuaire n’a pas été épargnée par la pandémie mondiale de Covid-19. Comment allez-vous, deux ans après le 1er rendez-vous Euromaritime à Marseille et comment se porte le 1er port français ?

Hervé Martel : La pandémie et ses conséquences ont mis en lumière le rôle essentiel du transport international, sans pour autant l’épargner. L’activité portuaire n’a jamais cessé de fonctionner. En 2020, le port a accueilli en moyenne 23 navires par jour, contre 25 en 2019. La crise sanitaire mondiale a entrainé une chute de trafics de 10 Mt en 2020, portant son trafic total à 69 Mt de marchandises traitées. Une baisse modérée qui a permis au port de Marseille Fos de garder sa place de leader français et d’envergure mondiale. Le port a également maintenu l’ensemble de ses investissements en 2020. Les 51 millions d’Euros investis en 2020, le dynamisme des projets menés, leur parfaite adéquation avec les plans de relance français et européens confortent le port de Marseille Fos dans sa trajectoire. En 2021, le port de Marseille Fos affiche une croissance de 9% sur ses trafics maritimes, portant son volume global à 75 millions de tonnes de marchandises traitées et a battu son record historique avec 1,5 million d’EVP traités?

La crise a fortement impacté la croisière et le trafic. Quelles conséquences pour Marseille, comment avez-vous réagi et comment s’annoncent les mois à venir ?

H.M : Le trafic passagers est assurément le segment qui a le plus subi la crise. La fermeture des frontières a mis à l’arrêt les liaisons internationales de passagers, que ce soit la croisière ou les ferries internationaux. Seules les liaisons avec la Corse ont perduré mais à des niveaux très bas notamment pendant les périodes de confinement. Nous avons tenu une place importante lorsqu’il a fallu rapatrier les passagers des navires de croisière. Nous avons également permis aux compagnies de stationner dans le Port sans surcoût et nous les avons accompagnées pour la reprise.

Plan « Zéro fumée », cold-Ironing, développement du GNL, photovoltaïque, hydrogène… Quelles sont les avancées du port vert de Marseille-Fos ?

Le projet stratégique que nous avions décidé avant la crise est en phase avec la relance verte, avec le besoin de réindustrialisation, d’accélération des transitions énergétiques. L’ensemble de nos projets reste pertinent , c’est pourquoi le port maintient l’ensemble de ses investissements prévus d’ici 2024. Soit 342M€ qui servent des projets greens, des projets smart, des projets innovants.

En ce qui concerne le programme de connexion électrique des navires à quai, nous avons installé la quatrième « potence » sur les quais pour la Corse en 2021, portant l’offre à 4 postes à quai équipés. Nous avons clôturé les études techniques et les travaux sont en cours d’analyse pour l’équipement du nouveau terminal international du Cap Janet. Nous entamons également les études techniques pour les quais croisière, qui seront équipés pour la saison estivale de 2025. En parallèle, le Port a engagé un investissement pour la production d’électricité par la mise en place de panneaux photovoltaïques sur les toitures de 6 hangars. Les études pour créer une centrale de 9MW sont en cours.

Le programme avance donc et dans le calendrier prévu. Et cela avance aussi à grande vitesse sur le GNL, sur l’accueil comme sur l’avitaillement des navires. Ce développement se fait en cohérence avec les investissements réalisés par les compagnies qui font évoluer leur flotte en se dotant de navires propulsés au GNL, ainsi que par le terminal méthanier de Fos Cavaou, qui offre un service de soutage GNL. Pour les compagnies de croisière, c’est une réelle dynamique d’investissement. En juin 2021, MSC Croisières lançait, aux Chantiers de l’Atlantique à Saint-Nazaire, la construction du MSC Euribia, son deuxième navire propulsé au GNL construit en France. Par ailleurs, dès 2020, Costa Croisières a renforcé sa présence à Marseille en proposant ses deux premiers navires propulsés au GNL : l’AIDAnova et le Costa Smeralda. Deux navires supplémentaires au GNL sont entrés en service fin 2021, le Costa Toscana pour Costa Croisières et l’AIDAcosma pour AIDA Cruises.

Et sur l’avitaillement, en décembre 2021, le navire souteur au GNL de TotalEnergies est arrivé au port de Marseille Fos pour approvisionner les porte-conteneurs propulsés au GNL de CMA CGM, et les paquebots de MSC Croisières.

Et sur l’hydrogène, en janvier nous avons annoncé avec H2V, l’implantation dans l’enceinte portuaire d’une installation industrielle de production d’hydrogène vert, pour un investissement de 750M€, soit le plus gros investissement depuis la création de la Zip. Cette installation de 600 MW sera développée en 6 tranches de 2026 à 2031. Un investissement colossal pour une production d’hydrogène vert par électrolyse de l’eau de 84 000 Tonnes par an qui couvrira à termes les besoins en électricité de la quasi-totalité de la Zip et permettra de créer 165 emplois directs.

Le port de Marseille-Fos agit-il aussi pour limiter l’impact de ses activités sur la biodiversité ?

En 2021, le port de Marseille Fos a lancé une vaste réflexion sur l’avenir de l’aménagement des 10 000 ha qui composent la zone industrialo por- tuaire. Aujourd’hui, sur cet ensemble, environ 3 000 ha abritent déjà des activités industrielles, de logistique, d’énergie, 1 000 ha resteraient à aménager, 3 000 ha sont des espaces verts et 3 000 autres ha sont des espaces naturels que le port a volontairement préservés et entretient en véritable gestionnaire de la faune et de la flore locale. Peu de personnes savent que le domaine portuaire abrite de nom- breuses exploitations agricoles prati- quant l’élevage, une agriculture rai- sonnée de céréales ou même des manades dans la Plaine de la Crau !

Vous présidez l’association MEDports. Quelles sont aujourd’hui vos relations avec les autres ports méditerranéens ?

H.M : Un des objectifs de la MEDports association est de renforcer les relations entre les ports de la Méditerranée dans le but d’augmenter notre visibilité sur la scène du transport maritime mondial pour attirer du trafic en Méditerranée et saisir des opportunités de croissance. Nos relations sont donc très bonnes et nous permettent de développer des actions communes de promotion et de formation.

Vous présidez l’association MEDports. Quelles sont aujourd’hui vos relations avec les autres ports méditerranéens ?

H.M : Euromaritime est une occasion unique à Marseille de montrer le rôle majeur des ports face à l’urgence climatique et dans l’atteinte des objectifs de décarbonation, de l’industrie nouvelle et des énergies vertes et renouvelables. L’économie bleue est un des moteurs essentiels de la croissance verte.

 

➜ Article extrait du journal spécial "Horizon Maritimité 2022" : lire le numéro complet ici 

 

Martel Hervé 180419 37

Hervé Martel, Président du directoire du port de Marseille Fos.

 

 Crédit photos : ©unsplash 

 


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